Petits joyaux greco-turcs

Les petits joyaux greco-turcs

Et si on mangeait un grec?!

La naissance du kebab a eu lieu en Allemagne lorsqu’un jeune immigré turc a eu l’idée de mettre de la viande grillée dans un pain au cours des années 60-70. La renommée du tout premier kebab se dispute principalement entre trois hommes, Kadir Nurman, Mehmet Aygun et Nevzat Salim laissant un flou sur le vrai précurseur. Les Turcs scandent que le kebab a bien été inventé dans leur pays et non en Allemagne. Bref, le mystère n’a pas empêché quiconque de terminer une soirée bien arrosée à 5h du mat avec une fringale et engloutir ledit sandwich ! Lorsque la Turquie s’appelait encore Empire Ottoman, les soldats turcs et grecs grillaient déjà des morceaux de viande en les tournant au dessus du feu avec leurs épées. 

Mon cher compatriote bourguignon Bertrandon de La Broquère indiquait en l’an de grâce 1433 dans son livre Le voyage d’Orient : « les Turcs me firent manger de la viande rôtie, qui n’était pas à moitié cuite, il s’en fallait de beaucoup, et nous la tranchions alors qu’elle rôtissait sur la broche ». Il aura fallu attendre la fin du XIXème siècle pour que la broche verticale soit inventée par Iskender. Servi en assiette ou en sandwich, le döner ou le gyros n’a pas fini de tourner ! Pour conclure, je finirai sur une touche de chauvinisme, les kebabs et hamburgers n’ont pas fait plier notre sandwich baguette qui demeure n°1 avec son jambon-beurre en France.

Le café traditionnel

C’est bien connu, tous les pays préparent le café à leur manière. En Grèce, nous avons été surpris en commandant notre 1er café : le serveur nous a listé exhaustivement sa carte. Il y en a de toute sorte : des froids, des chauds, des frappés, des petits, des moyens, des américains, des espressos, sucrés ou non… et surtout le fameux café grec traditionnel Ellinikos. De quoi faire pâlir un italien ! Boire un café grec ou turc (Kahvesi) sans finir avec du marc sur les dents, c’est possible, à condition d’attendre que le marc se dépose au fond et aspirer le breuvage plutôt que de le boire rapidement. Nous comprenons mieux pourquoi le café est servi avec un verre d’eau.. pour se rincer les dents. Qu’il soit grec ou turc, il se prépare dans une mini casserole en cuivre ou en fer blanc à base d’un mélange de café, d’eau et de sucre à feu vif mais sans le faire bouillir.

Si vous êtes en hypoglycémie sévère, accompagnez votre dégustation de baklavas et de loukoums, petits gâteaux composés essentiellement d’ingrédients légers : beurre, sucre, arachides !

A Denizli, tout en partageant un café entre amis, un turc nous a expliqué quelques usages et traditions autour de ladite boisson. Certains sont encore d’actualité.

Lorsqu’un turc reçoit des invités dans sa maison. Il sert un café et un verre d’eau :

→ Si l’invité boit le verre d’eau en premier, cela signifie que la personne a faim. Dans ce cas, la famille s’affaire en cuisine pour préparer de quoi contenter l’hôte.

→ Si l’invité commence par le café, on lui demandera s’il a faim. Si une personne retourne sa tasse de café dans la soucoupe, cela signifie qu’elle souhaite connaître son avenir. Un de vos amis interprétera les formes dessinées par le marc de café pour connaître votre destinée.

Quelques exemples : deux lignes épaisses vous annoncent un voyage par voie maritime, un dessin de clé signifie que vous allez déménager, une poire est le signe que vos ennuis se terminent bientôt ; les trois points en triangle indiquent qu’un de vos amis vous demandera de l’aide. Aidez-le. Et bien d’autres !

Le café s’immisce également lors de certaines occasions familiales. Dans un premier temps, les couples turcs se côtoient puis vient la rencontre des parents. Une fois qu’ils ont terminé de discuter de divers arrangements : si la femme sert un café salé à son prétendant, elle ne souhaite pas se marier avec lui (ou lui fait une blague selon le degré d’humour de la famille !). Si elle sert un café sucré, cela signifie qu’elle est d’accord.

Un oeil sur le mauvais sort

L’oeil porte bonheur déjoue jaloux et envieux qui souhaitent vous jeter un sort à travers le mauvais oeil. Il s’agit du Matiasma en Grèce et du Nazar Boncuk en Turquie. Il se retrouve accroché à l’entrée des maisons, des rétroviseurs de voiture, suspendus aux terrasses, en porte clés, etc.. Une grande partie de la production est constituée de bouteilles de raki recyclées ! Si vous êtes superstitieux, ne repartez pas de ces pays sans votre amulette. Vous en trouverez partout dans les bazars.

Cha plait

Que l’on soit chrétien orthodoxe ou musulman, la Grèce et la Turquie accordent une attention particulière à cet objet de dévotion qu’est le chapelet (Misbaha pour les musulmans, Tchotki pour les chrétiens orthodoxes).

Il danse, il glisse, il file entre les doigts, il claque sur la main, dans un sens puis dans l’autre. Le chapelet tourne sur les doigts en signe de bravoure ou pour réciter des prières.

Chacun choisit celui qui lui convient : 33, 50, 99, 100 ou 300 grains. Les petits joyaux en bois, en métal ou en pierre précieuse virevoltent fièrement peu importe la religion.. Pas de discorde sur le chapelet !

La Turquie pour les enfants

Petites histoires de Turquie

Arrivés à bord d’un ferrie depuis Rhodes, nous débarquons en Turquie, notre deuxième pays après la Grèce. La capitale du pays est Ankara. Toutefois la plus grande ville du pays demeure Istanbul qui garde sa grandeur d’antan.

Autrefois nommée Constantinople, elle s’est développée sous l’empire romain jusqu’à sa conquête par les ottomans, musulmans venus d’Asie Centrale, au XVème siècle. A son apogée au XVIème siècle, l’Empire ottoman bordait une grande partie de la Mer méditerranée et de la mer Noire. Cet empire s’est fragmenté au début du XXème siècle.

L’actuelle Turquie se dresse sur une partie de ces anciens territoires, aux confins de l’Europe et aux portes de l’Asie. Il nous faut donc utiliser une nouvelle monnaie, la livre turque en échangeant nos derniers euros dans un bureau de change. Au mois de juin 2019 : 1 € = 6,5 TL

Mille et une mosquée

Dans les différents pays du monde, il existe trois religions monothéistes principales. C’est à dire que les gens croient en un seul Dieu et ont des lieux de culte différents.

  • Les chrétiens reconnaissent Jésus comme le messie et prient dans les églises.

  • Les juifs prient dans les synagogues et appellent leur Dieu Yahve.

  • Les musulmans pratiquent l’Islam, croient en leur Dieu Allah et prient dans les mosquées.
Nous verrons dans d’autres pays qu’il existe d’autres religions, mais n’allons pas trop vite !

Mosquée Konak à Izmir

Mosquée Mevlana à Konya

En Turquie, plus de 80% de la population croient en l’Islam, la religion musulmane. C’est pourquoi on a pu croiser autant de mosquées dans notre voyage en Turquie. Chaque village a sa mosquée et les villes en ont mêmes plusieurs. Cela nous a rappelé la Grèce avec ses nombreuses églises et chapelles.

Certaines femmes portent un voile sur leurs cheveux par pudeur ou par conviction religieuse. Elles choisissent souvent de très belles couleurs pour allier beauté et religion. Quant aux hommes, ils font tourner leur chapelet sur leur main pour réciter leurs prières.

Le muezzin est chargé de l’appel à la prière 5 fois par jour depuis un minaret (la plus haute tour sur la photo). C’est un peu comme les cloches des églises en France.
Il existe différentes tailles et styles architecturaux. Nous avons aimé les visiter et contempler leur beauté.

La traite des vaches avec Zélia à Olgunlar

Loup se réveille à Olgunlar, petit village de montagne, après une bonne nuit de sommeil. Il boit son verre de lait et déjeune du pain grillé avec du miel. Aujourd’hui, une question le taraude :
« Mais d’où vient le lait ? Il est drôlement bon !
– Bonne question Loup. Nous sommes au bon endroit pour te répondre, lui dit Charline. »
Le déjeuner terminé, Charline embarque Loup pour une visite à la ferme. Loup enfile ses bottes et nous voilà partis à l’étable rejoindre Zélia.

«  Bonjour Zélia, Je vous remercie de nous accueillir chez vous, s’exclama Loup.
– Enchanté Monsieur Loup. Je te propose d’observer la traite des vaches pour que tu comprennes mieux d’où vient le lait que tu bois. Pour commencer, je fais rentrer les vaches dans leur étable. Je m’installe sur mon petit tabouret en bois pour être au niveau des pis, lui expliqua Zélia.

– Pourquoi les vaches meuglent ? s’étonna Loup. On dirait qu’elles ne sont pas contentes de ne plus être dehors à brouter l’herbe.
– Elles rechignent rarement à rentrer et des fois, ce sont mêmes elles qui beuglent devant l’étable et me rappelle que je suis en retard pour la traite ! C’est un moment que les vaches attendent car elles ont beaucoup de lait et cela soulage leurs mamelles de les traire, précisa Zélia.

 

– Ah d’accord, je comprends mieux. Et à quel moment de la journée a lieu la traite ? questionna Loup.
– La traite a lieu deux fois par jour, le matin et le soir, chaque jour de l’année, répondit Zélia.

– Vous faites un beau métier et vous êtes très courageuse, rétorqua Loup.
– Merci Monsieur Loup. Nous sommes nés ici et nous avons repris la ferme des parents de mon mari. C’est un métier qui demande du temps mais nous aimons tellement la montagne, la ferme et les animaux que nous sommes vraiment heureux au pied du Mont Kaçkar ! Nous voyageons grâce aux vacanciers de passage qui nous parlent de leurs pays et de leurs vies, un peu comme toi Loup. »

L'écrémage avec Ibrahim

« Viens avec moi Loup, nous allons emmener le sceau de lait à mon mari. Il va te montrer la suite du travail. »
Sous un petit appentis, Ibrahim, verse le sceau dans l’écrémeuse puis tourne la manivelle. Le lait frais sort de la crème d’un côté et du lait écrémé de l’autre.
«  Wahou c’est magique, s’émerveilla Loup qui s’empresse de tourner la manivelle à son tour.

– Parait-il que tu habites dans un endroit où il y a du très bon fromage Loup ? demanda Ibrahim.
– Oui, tout à fait. Je viens de la capitale du comte, Poligny, c’est un fromage à pâte dure contrairement à votre fromage à pâte molle. Il y en a du doux et du fruité pour tous les palais, dit-il en se léchant le museau un peu nostalgique en pensant à son fromage préféré. »

Loup et Charline retrouvent Charlie qui était parti observer les apiculteurs en plein ramassage de miel.

De retour au chalet, Loup et Charline sortent du fromage fraichement acheté à la ferme pour entamer la dégustation.

« Ça ne sent pas très bon ! soupira Charlie.
– Tu ne vas pas nous en faire tout un fromage ! lui répondent en cœur Charline et Loup. »

 

Une histoire de gourmandise

Dans les montagnes turques, le miel est tellement succulent que les ours alléchés par l’odeur profitent de la nuit pour en manger directement dans la ruche. Quels coquins ces ours !

Le matin, les apiculteurs ne sont pas contents en découvrant les ruches attaquées. Les abeilles sont agitées et de peur, piquent les professionnels.

Beaucoup de propriétaires de ruches installent des caméras pour surveiller les ours la nuit et renforcer la sécurité des ruches.

Un apiculteur a offert une petite dégustation aux ours pour savoir parmi différentes sortes de miel quels étaient leurs préférés.

« Oups…

Pris la main dans le pot ! »

La fée Cappadoce

Au cœur de la Turquie se dessine dans la brume un paysage fantastique parsemé de formations rocheuses propice aux contes de fée.

Il y a des milliers d’années, des volcans ont dessiné un paysage coloré (jaune, blanc, rouge) avec des couches successives de cendres et de laves.

Près d’Uchizar, une petite fée sort sa tête par une fenêtre creusée dans la roche pour faire son tour quotidien. Elle déploie ses ailes et commence par survoler la vallée des pigeons afin de saluer ses amis. Puis elle fait un détour par la vallée de l’amour avant de revenir par celle des épées.

La fée Cappadoce a traversé les siècles, elle connaît l’histoire et les recoins de ces vallées mieux que personne. Elle a élu domicile dans une maison troglodyte qu’elle a décoré avec goût. Cette fée remplit avec brio sa mission de protection de sa région.

Il y a fort longtemps, elle guettait les envahisseurs venus de pays lointains et prévenait les villageois de Cappadoce en cas d’attaque. A la vue d’une armée ennemie, ni une, ni deux, elle rassemblait tous les habitants et les guidaient jusqu’aux entrées secrètes des villes souterraines. Là, animaux et humains pouvaient se réfugier pendant que les soldats combattaient les assaillants au-dehors.

Elle est aussi la gardienne des cheminées de fée. Elle veille encore aujourd’hui sur ces étranges formations géologiques que le vent, la pluie et le gel effritent année après année. Ces cheminées sont formées d’une accumulation de couches d’un tuf friable surmontées de roches plus dures. Fragiles comme des châteaux de sable, le paysage change avec le temps. Les cheminées s’affinent sous les effets de l’érosion avant de s’effondrer et de disparaître.

Alors pour protéger les habitants, la fée Cappadoce a toujours surveillé l’avancée de l’érosion et prévient les habitants lorsqu’il est temps de déménager dans une maison au nouveau village.
Elle doit rester prudente et ne pas trop s’approcher des montgolfières lorsqu’elle survole ces terres puisque ses ailes sont extrêmement fines et fragiles. Ces ballons volants ne lui veulent aucun mal. Ils promènent les touristes qui admirent la vue depuis les airs.

Pour autant, un ennemi, bien mal intentionné, rode dans les environs. La sorcière Carabosse, a tenté plusieurs fois de prendre la place de sa rivale la fée. En vain.
Les habitants ne sont pas dupes. Ils savent combien leur fée Cappadoce, fidèle et précieuse, les a protégé de mille et un soucis. Ils sont donc partis à la chasse à la sorcière Carabosse et ont réussi à la repousser au-delà des frontières de la Turquie. La fée Cappadoce peut donc continuer à voler, ailes au vent, protéger cet environnement doré.

Pour aller plus loin

Pour en savoir plus sur la Cappadoce, son histoire, ses formes géologiques et ses incroyables villes souterraines, je vous conseille le reportage de Jamy, Fred et Sabine, j’ai nommé C’est pas sorcier !

Les plantations de thé

Les turcs adorent le thé. Ils en boivent à toute heure. Ils ont d’ailleurs des plantations de thé dans la région de Rize. Loup a regardé la cueillette des feuilles de thé. Les ramasseurs déposent les feuilles dans de grosses hottes en osier puis les porteurs les rassemblent dans de gros sacs en toile de jute. Ça ressemble aux vendanges sauf qu’ils ramassent des feuilles et non du raisin !

Loup se demande si c’est un téléphérique ou une tyrolienne et s’il aurait le droit d’en faire un tour !
Le porteur lui répond que ce n’est pas pour transporter des homme ni des animaux.
Cette installation permet de descendre ou monter de lourds sacs sur ces terrains en pente. Il lui accorde toutefois de monter dessus pour une petite photo.

Après avoir contemplé le travail des ramasseurs de thé, Loup s’offre une petite sieste sur la cueillette du jour.

A son réveil, il ne manque pas une petite dégustation de thé avec notre ami Ahmet !

Güle güle

Au revoir en turc

Denizli

Denizli, Pamukkale et Ephèse

Nous partons de Konya pour Denizli, grande ville à quelques dizaines de kilomètres de Pamukkale. Clairement, les touristes ne prennent pas le temps de visiter cette ville moderne, dont l’attrait ne se situe pas dans les monuments mais dans l’hospitalité de ses habitants.

Nous commençons par la visite du site de Pamukkale et arrivons pour l’ouverture de l’entrée côté village. Mais nous ne sommes pas les premiers. Toutefois le site est encore tranquille. Les travertins s’offrent à nous pendant quelques minutes avant l’invasion… Sauf que (mauvaise) surprise, nous constatons qu’il n’y a pas une goutte d’eau dans les plus beaux travertins. Cela est dû au nettoyage pour éliminer des algues qui s’accumulent dans les piscines.

Un peu déçu, nous en arrivons donc rapidement à la visite des ruines de Hiérapolis, dont l’amphithéâtre (romain) est la pièce maîtresse. Comme il faut marcher, cela a le mérite d’en décourager certains. La matinée se termine et le mercure grimpe. Nous terminons notre visite des vestiges avant de redescendre vers le village.

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On était prévenu mais quand même. Sous nos yeux, la maladie des réseaux sociaux s’abat sur les gens comme la vérole sur le bas clergé : Un bon nombre de touristes rivalisent de stupidité en prenant des poses plus ou moins suggestives quand d’autres portent des tenues pour le moins particulières.

Après avoir « profité » de ce spectacle, il est grand temps pour nous de rentrer sur Denizli…

Si les turcs sont accueillants, vraiment, les habitants de Denizli ont un truc en plus. Lorsque nous revenons de Pamukkale, un automobiliste accompagné de sa femme nous propose spontanément de nous remonter depuis la gare de bus jusqu’en centre ville, juste pour le plaisir de bavarder avec nous. Là on se dit que c’est quand même cool…

Le soir, en chasse de notre nourriture quotidienne, nous tombons sur un petit troquet, dont la terrasse est abritée par un vieille arbre. Les locaux fument la chicha ou boivent un çay en refaisant le monde (ce sont là trois passions turques : fumer, boire des litres de thé et bavarder).

Bref, à peine installés, nous sommes invités à la table voisine par trois messieurs. L’un d’eux, Davut, parle un anglais impeccable ce qui facilite nos échanges. La conversation est à bâton rompu sous l’oreille attentive du patriarche, surnommé le « Président », qui nous pose des questions ou nous retourne des réponses bien senties.

La faim se fait sentir, quand Davut, après avoir réglé les consommations, nous expliquent que nous sommes invités à diner : Trop dur la vie !

Nous voila dans le restaurant de pidé où nos trois compères sont comme à la maison. Les pidé se succèdent, nous testons la limonade traditionnelle de la ville et là encore, pas moyen de mettre la main à la poche. C’est qu’ils ne plaisantent pas avec le mot « invitation » les turcs !!

Pour digérer, quoi de mieux que de reprendre quelques çay tous ensemble et de continuer nos discussions sous le vieil arbre …

Le lendemain, c’est par le rail que nous parvenons à Éphèse. Souvent délaissé au profit du bus, le train est un moyen peu coûteux et efficace de se déplacer en Turquie. Sur les conseils de Davut, nous laissons nos bagages à l’otogar et direction la cité sous un soleil brulant.

C’est encore un voyage dans le temps, un aller retour pour l’Antiquité. Nous dépassons la voie Arcadienne et le théâtre vers l’impressionnante Agora commerciale (ou Agora basse). Il faut prendre le temps de faire le tour de cette grande place carrée et se laisser transporter à travers les siècles avant de passer sous la porte de Mazaeus et Mithridate qui mène devant la bibliothèque de Celsus. Derrière sa façade monumentale de 16 m de haut par 10 de large était conservée 12.000 rouleaux de parchemins, ce qui en faisait la 3e plus grande bibliothèque de l’époque.

Un petit détour par les latrines offre une jolie vue sur la façade :

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C’est ensuite une route, pavée de dalles de marbre qui ont traversé les siècles, qui permet de remonter vers la haute Agora et le reste de la ville.

Notre train pour Izmir, dernière étape de notre périple nous attend…

Goreme

Göreme à pied

Après moult heures de bus, un saut de dolmuş et une petite course en taxi, nous atteignons Göreme, ses maisons troglodytes, ses cheminées de fée et ses sables multicolores.

L’histoire géologique de la Cappadoce commence il y a dix millions d’années par les éruptions successives des volcans Argée, Hasan et Göllü, qui s’étalèrent sur environ deux millions d’années. Les différents pyroclastes projetés dans les environs constituèrent des couches de 100 à 500 mètres d’épaisseurs qui forment le sol actuel de la région.

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Puis, une couche de basalte s’est déposée il y a environ 2,6 millions d’années, au dessus de ces tufs accumulés au cours des millénaires précédents. Ce basalte s’est progressivement fracturé sous l’effet du refroidissement climatique. L’eau s’est ensuite infiltrée par ces craquelures et a commencé le lent processus d’érosion. A une période plus sèche, c’est le vent qui a pris le relais. Les grains de sable ainsi soulevés ont exercé un effet abrasif sur les différentes roches. Les couches de tuf, plus tendres, se sont progressivement désagrégées alors que les blocs de basalte plus durs ont mieux résisté. C’est ainsi que ce sont formées les différentes formes que nous connaissons aujourd’hui.

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Les variations de couleurs des différentes couches de tuf sont dues aux différents éléments chimiques qui les composent et varient en fonction des diverses périodes de l’activité volcanique.

Malheureusement, le village s’est transformé en ville – disneyland, avec ses restaurants à la bouffe fade et hors de prix, ses boutiques de souvenirs bas de gamme et ses bars à chicha fréquentés uniquement par les touristes.

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Il faut enfiler ses chaussures de marche pour découvrir les environs. Les différentes vallées aux noms évocateurs (vallée de l’amour, de l’épée, des pigeons, rouge, rose ou blanche) offrent chacune des paysages différents. Si certaines ont des passages ombragés, il fait rudement chaud et il est préférable de les parcourir le matin ou en fin d’après-midi. En plus à ces moments, la lumière est plus jolie. Sans vous garantir la solitude, vous devriez être peinard pour profiter des différents points de vue et des églises troglodytes. Si vous ne deviez en voir qu’une celle aux quatre colonnes est vraiment belle.

Déjà utilisées sur la voie lycienne les applications Maps.Me et Trail Smart sont bien utiles pour se balader et accessoirement gratuites. Pour des détails, référez vous au blog Novo Monde et aux conseils avisés de Benoit.

Vallées de l'amour, blanche et Uçhisar

Notre première sortie débute au nord de Göreme. Le chemin grimpe sur la colline avant de redescendre dans la vallée de l’amour… nom imagé, donné en raison des nombreuses cheminées de fée aux formes pour le moins phalliques qui la parsème. Nous enchainons par la vallée blanche qui nous mène au village de Uçhisar.

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En remontant de la vallée, au lieu dit Bağlidere (ici) se tient un vendeur de jus d’orange qui nous arnaque (50 TL pour deux verres, au lieu de 20). Furieux, je barre la route à sa mobylette avec des pierres et des branches en amont du chemin. Quant à Charline, elle signale l’entourloupe sur une grosse pierre. Quelques instants après avoir fini ma construction, notre vendeur et son comparse se retrouvent bloquer. S’en suit une bonne engueulade dont j’ai le secret. Le second bonhomme, plus âgé et qui n’a pas assisté à la vente reste circonspect. Les deux gusses dégagent le chemin et passent…

Courroucés et affamés, nous poursuivons vers le village. Dans la montée, la deuxième personnage revient et nous rembourse la différence. Nous sommes agréablement surpris. Je m’excuse platement pour ma vengeance et lui pour la mal honnêteté de son camarade. Sans rancune donc.

A Uçhisar, si il vous reste un peu d’énergie le château vaut vraiment le coup; la vue sur Göreme et les vallées est sympathique. Il y a aussi une épicerie bien achalandée (la), ce qui a son importance en voyage ! Pour le retour, nous optons pour le dolmuş qui se prend en descendant vers l’ouest, sur la route principale.

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Boucle Gorëme, vallées des Pigeons et de Zémi

Nous débutons notre seconde randonnée au sud ouest de la ville en direction de la vallée des pigeons. Le chemin est parfois un peu difficile à suivre en raison des nombreux carrefours, mais rien de bien méchant. On retrouve Uçhisar, dont on peut admirer le versant est. On y voit de nombreuses habitations troglodytes avec leurs fameux pigeonniers, dont certains sont encore joliment décorés.

Le tracé remonte ensuite vers un point de vue au sud de Uçhisar, où nos amis venus d’un certain pays d’Asie descendent quelques instants de leurs gros bus climatisés pour prendre des photos.

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Bon a ce stade de notre récit de voyage, si vous trouvez que je sombre dans un racisme anti-chinois de base… vous aurez raison ! Je précise que je méprise seulement les touristes aux comportements exécrables que nous avons pu voir et non le peuple tout entier.

Bref nous quittons ce beau monde pour une vallée ombragée, avec quelques églises troglodytes sympa le long du chemin ou nécessitant un léger détour. Nous parvenons, par le sud de Göreme, à la vallée de Gorkundere, qui offre plusieurs points de vue sur les environs. De là vous pourrez aisément admirer les lever ou coucher de soleil ; ou « sunrise » et « sunset » pour ceux qui préfèrent les anglicismes…

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De Gorëme à Çavuşin par l'Akdag et Zelve

Je me décide à faire en solo le grand tour qui doit me permettre de grimper l’Akdag (« montagne blanche ») qui culmine à environ 1300 m. Le départ se fait avant les premiers rayons de soleil afin de voir les troupeaux de montgolfières au dessus des vallées. Si le spectacle est joli, les pilotes commettent parfois des imprudences pour épater les touristes.

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Je rencontre sur ma route un premier chien, blanc, puis un second, noir ; tous deux décident de me suivre malgré l’heure matinale. Nous visitons ensemble plusieurs églises dont l’une, celle aux quatre colonnes, m’émeut particulièrement.

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La grimpette commence en direction d’un point de vue situé à l’est de la vallée rouge. Plusieurs campeurs avisés ont d’ailleurs monté leurs tentes dans le coin. Petit plus, le parking en contrebas dispose d’un point d’eau.

C’est à ce moment que je fais une belle connerie. J’attaque la montée par la face sud, dans un éboulis, suivi d’une petite crapahute un brin dangereuse. Bien entendu il existe deux chemins qui mènent au sommet, sans danger… Passons.

De là haut, la vue est imprenable et embrasse toutes les vallées. Je poursuis mon chemin avec mes compagnons à poils qui jouent dans les herbes. La température commence à monter et il n’est pas encore 9h lorsque j’entame la descente, abrupte à la fin, vers le musée en plein air de Zelve (payant). Moins fréquenté que celui de Göreme, il est tout aussi joli. Hélas c’est là que mes amis à quatre pattes me quittent.

Je poursuis vers l’église de saint Jean Baptiste et les quelques cheminées de fée qui l’entourent. Je décide de ne pas y mettre les pieds à la vue des (trop) nombreux bus de chi… touristes.

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Ma route continue vers Çavuşin, son château et son église qui valent bien le crochet. Après ma visite de cette dernière, en descendant j’entends l’Ave Maria raisonné et je me rentre à Göreme, épuisé.

Les alpages turcs

Alpages turcs

Plateau d'Anzer Balliköy

La route encastrée dans un lit de rivière rejoint progressivement le plateau d’Anzer. Nous prenons le temps de nous arrêter au café du premier village, Ciçekli. Le propriétaire conserve fièrement tous les outils des anciens. L’ancêtre reste à l’honneur. D’ailleurs, les portraits des patriarches de la famille décédés sont affichés de génération en génération dans les cafés des villages.

Après quelques thés et un conseil de prudence sur les ours, nous voilà partis à la recherche d’un campement… (pas vraiment sereine!)

Nous retrouvons notre ami turc et son amie polonaise pour le campement du soir. Leur choix s’oriente vers un lit de rivière pour planter la tente. Compte tenu du bruit et des orages pluvieux des derniers jours, notre niveau en rafting sur matelas nous semble léger! Nous rebroussons chemin vers l’hôtel du village et pas mécontent de cette rencontre, j’ai nommé Osman le propriétaire de l’hôtel de Balliköy.

 

Ce monsieur est un pilier de village : café, restaurant, hôtel, boucherie, épicerie.. Nous arrivons dans une véritable institution. Oui, Osman est le genre de monsieur qu’on respecte profondément. Il fait tourner le village et réunit dans sa salle, jeunes et anciens, autour du poêle et d’un thé. Chacun se réjouit de jouer aux cartes, au Okey et d’apprendre aux novices. Du lien social à l’état pur comme on l’aime, dans ce coin reculé où le téléphone portable ne sert qu’à téléphoner ;-).

Le matin, quelques personnes passent faire des petites courses d’appoint, certains prennent un thé, la famille passe récupérer le demi mouton découpé, d’autres s’arrêtent pour acheter du pain, acheter du miel. Nous sommes présents dans la salle lors de la défaite de la France contre la Turquie. Difficile à assumer après une coupe du monde remportée en 2018…A la mi-temps, je fais diversion et partage avec Osman quelques leçons de découpe à la turque du mouton autour de son billot.

L’hospitalité à la turque continue dans une famille qui nous a touché par sa gentillesse. Citadins de Rize, ils reviennent aux sources dès que possible les weekend et l’été pour retrouver la vie paisible à Balliköy. Les dames nous font goûter leurs victuailles : pain fait maison, fromage du coin, miel d’Anzer, olives, … Les hommes s’affairent à construire une balançoire et une bibliothèque en bois. On joue, on discute, on s’échange des cadeaux improvisés, chacun souhaite garder un souvenir de cette journée en famille.

Lors d’un voyage au long cours, la famille vient à manquer. C’est avec émotion que je quitte cette famille qui m’aura offert un véritable dimanche en famille.

Un objectif raté de peu

Charlie me laisse à l’hôtel pour partir à l’assaut d’un lac d’altitude sur la route du col d’Anzer. Je le laisse vous contez la suite de cet échec complet !

Je prends la voiture pour m’avancer sur le chemin de pierre vers le col jusqu’à être arrêter par un tas de neige infranchissable. J’attaque la montée en épingle, à pied, au milieu des ruches, et je laisse le torrent dans sa vallée. La pente est de plus en plus forte, malgré les zig-zag de la « route ».

Je rencontre un premier névé que je traverse sans trop de difficulté… puis un second, sur une pente un peu plus forte… puis un troisième, où cela devient franchement casse-gueule.

Au début du quatrième névé, après environ deux heures de marche, je me pose sérieusement la question de savoir ce que je fais là ! Lorsque je me tourne pour regarder la pente, je glisse et me rattrape uniquement grâce à mes bâtons de marche. Pas de casse, mais clairement je ne peux pas continuer. Rebrousser chemin me semble tout aussi périlleux.

Il ne me reste qu’une seule solution, la luge : je m’assoie dans ma « rain cover », mon sac à dos devant moi et mes bâtons en guise de freins et c’est parti. La technique est plutôt efficace. En moins d’une demi-heure, je rejoins la voiture, après trois sessions de luge.

Je retrouve Charline, étonnée par un retour aussi rapide. Je suis bien obligé de lui dire que je n’ai pas atteint mon objectif ; tant s’en faut !

Le miel d'Anzer-Balliköy

Pendant notre séjour, un apiculteur nous a expliqué la malice et l’ingéniosité des ours pour manger du miel. Certains professionnels, dont lui, ont fait installer des vidéo-surveillances pour surveiller le comportement des ours et ainsi, sécuriser davantage leurs ruches. Mais parfois en vain… Il nous montre les ours qui s’essayent à la clôture électrique et malgré une châtaigne, ils réitèrent !

Les abeilles butinent pas moins de 500 fleurs endémiques lui donnant un goût si particulier. Servi avec les rayons, sa couleur dorée et son goût sont si spéciaux que vous fonderez même si vous n’aimez pas le miel. Sur place, il était possible d’acheter des pots à partir de 80euros. En revanche, sur internet, les prix explosent, mieux vaut opter pour le déplacement !

...certifié par les ours!

Un apiculteur, fatigué de voir ses ruches attaquées, a décidé cet été de faire tester ses différents produits aux ours en leur préparant plusieurs récipients remplis de miel. Malgré les différents essais, le miel d’Anzer-Ballikoÿ finit toujours premier. A chaque distribution, Monsieur Ours s’enfile pas moins de 400 euros de miel au grand plaisir de ses papilles ! Prestation en nature du testeur en chef un peu onéreuse!

Après un excellent déjeuner préparé par Eser, il est temps de partir – à contre coeur -. La séparation avec Osman, Eser et cet habitant fut aussi compliquée pour nous que pour eux.. Comme à notre habitude, nous laissons derrière nous un petit effet, cette fois-ci une lettre en anglais. Nous comptons sur notre ami Köskal pour leur traduire prochainement.

Sans toujours comprendre chaque mot, ces hôtes d’exception ont partagé leur vie quelques jours et ont pris soin de nous. Ils étaient fiers que des touristes s’intéressent à leur village, leurs jeux, leurs cultures. Ils craignaient d’ailleurs ce que pensaient les français des turcs.  Alors, s’il vous plait, avant de poser un avis négatif sur les turcs,  stop aux préjugés télévisuels, mieux vaut se rendre sur le terrain ! 😉

Yusufeli, bientôt rayée de la carte

Avant d’arrivée à Yusufeli, nous traversons un chantier d’envergure avec ses baraquements de travailleurs qui grouillent telle une fourmilière. Après une discussion avec un habitant, nous comprenons qu’il s’agit d’un énième barrage sur la rivière Coruh : « la ville et sa vallée vont disparaitre noyées sous les eaux du futur lac, d’ici 3 ans ».

Ce barrage (haut de 270m) et sa centrale hydro-électrique vont permettre de produire 5% de la consommation énergétique du pays. Mais, environ 15.000 habitants seront expropriés et déplacés vers la ville nouvelle de Yansiticilar, à peine sortie de terre. Pas loin de 15.000 personnes supplémentaires seront affectées par le projet (absence de liaison avec la ville, les services de proximité, commerces et école, etc..).

Par ailleurs, le futur site est aride, accidenté, rocheux et aucunement propice à une installation ou à l’agriculture. Les plantations et le bétail ne tiendront pas bien longtemps dans ce nouvel environnement.

L’association des habitants accuse Alstom (soutenu par la France) de contrevenir à certaines règles communautaires et internationales. Ainsi, le géant français contournerait même des règles fixées par la commission mondiale des barrages… Commission dont il est membre !

Outre les conditions de réinstallation défavorables aux habitants, le gouvernement turc envisage de construire 10 barrages supplémentaires sur la même rivière. S’il y avait déjà de l’eau dans le gaz entre la Turquie et la Géorgie (se trouvant en aval) qui n’avait pas donné son accord pour le barrage de Yusufeli, ceux-ci risquent d’être la goutte d’eau qui fera déborder… le lac !

Nous fuyons nous réfugier à Olgunlar dans un village qui devrait rester, encore un bon moment, loin de ces grands projets.

Olgunlar

En hiver, Olgunlar est un hameau un peu plus fréquenté par les touristes, notamment internationaux, qui viennent skier dans ces montagnes sans une remontée mécanique. Les amateurs de poudreuse chaussent les peaux de chamois ou s’envolent en hélicoptère avant de glisser sur le manteau neigeux. Toutefois, ses habitants hivernent au village de Yaylalar, 3km plus bas.

Plus petit qu’Anzer, Olgunlar se compose de quelques chalets où le foin dort au grenier et la traite des vaches rythme la journée. S’en suivent écrémage du lait pour les uns et pâturage des bêtes pour les bergers. J’ai eu la chance d’assister à la traite des vaches dans une étable avec Zélia et son fichu sur la tête, me voici plongée dans la ferme de mes grands parents 25 ans en arrière. Charlie n’est pas autorisé à entrer car leurs vaches ne sont pas habituées à la présence des hommes lors de la traite. Merci de laisser les ladies entre elles ! A chaque sceau rempli, le lait est versé dans l’écrémeuse manuelle par le mari, Ibrahim, qui se charge de séparer le lait et la crème.

Les montagnes du parc national de Kaçkar comportent plusieurs sommets de plus de 3000 m. Nous avons eu envie de nous approcher du pied de son point culminant le Mont Kaçkar. Depuis Olgunlar, nous parcourons les ruelles puis suivons un torrent en direction du hameau d’Hastaf. Au moment où nous sommes passés, le hameau était inhabité et semblait ne plus voir les transhumances d’antan.

Pas un cha dans cette verte vallée, quelques ânes, chevaux et vaches pâturent tranquillement au milieu des ruisseaux qui descendent des dernières neiges. Le vent se lève, le ciel s’obscurcit, nous pique-niquons rapidement avant de redescendre vers Olgunlar. L’orage est sur nos talons et se déchaîne lorsque nous passons la porte de notre chalet. L’électricité se coupe. Nous finissons la soirée à la bougie à manger des arachides.

Pour clôturer notre parenthèse dans ces montagnes, nous avons eu la chance de voir nos premiers ours sur l’autre flan de la montagne, suffisamment loin pour les admirer et non les fuir!

Où est Charlie?

Pour finir, sortez vos lunettes et trouvez Charlie dans le hameau d’Hastaf !